Les Folies-Bergère : une pornographie « select »

 


 

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1Au XIXe siècle, les lieux de spectacle sont légion et les music-halls se développent considérablement, surtout durant le Second Empire et les débuts de la IIIe République. Ces « théâtres où l’on fume [1][1]À la fin du XIXe siècle, les rubriques consacrées aux arts du… » deviennent alors de hauts lieux du divertissement mondain. Parmi eux, les Folies-Bergère occupent une place particulière, notamment par leur ouverture en 1869, soit bien avant leurs concurrents (le Moulin-Rouge, le Casino de Paris ou l’Olympia). Le plaisir que vient y goûter un public nombreux et élitiste s’apparente à une fête des sens. Les spectacles, franchement érotiques ou emplis d’allusions peu voilées, ne constituent pourtant pas l’essentiel de cette fête : le promenoir est le lieu d’un commerce des corps et de rencontres galantes ; les artistes, ballerines débutantes ou grandes cocottes, contribuent également à la réputation sulfureuse qui accompagne l’évolution du music-hall de la rue Richer. Temple des représentations – sur scène et dans la salle – liées au sexe, de la licence et des amours vénales, les Folies-Bergère, certes, offrent l’image d’un espace pornographique. Cependant, il est fort éloigné des lieux de perdition où vont parfois s’encanailler les bourgeois en quête de sensations fortes et de bonnes fortunes. Rue Richer, tout est permis, légitimé en quelque sorte par la composition sociale d’un public aisé : la pornographie, publiquement considérée comme abjecte et réprouvée par la morale, devient objet esthétique et mondain sur la scène des Folies-Bergère. Sous le prétexte d’aller admirer les ballets inscrits au programme, qui comportent d’ailleurs les noms des grandes courtisanes de la fin du siècle, le spectateur peut à loisir regarder ou consommer les beautés qui essaiment le promenoir.

2Dans un contexte de campagne en faveur des « bonnes mœurs », menée par le « père la pudeur » René Bérenger [2][2]Bérenger, sénateur inamovible à partir de 1875, est connu pour…, le music-hall poursuit toutefois le développement des activités prostitutionnelles du promenoir, l’exhibition du demi-monde qui ne cesse de hanter les imaginations depuis Dumas fils [3][3]La Dame aux camélias, roman publié en 1848, adapté au théâtre… et des numéros sensuels dans lesquels le physique des interprètes féminines et la suggestivité des poses sont destinés à susciter les fantasmes du public. Exploitant à l’extrême un contexte littéraire et pictural qui fait la part belle aux personnages de prostituées, de danseuses et comédiennes entretenues et aux milieux spectaculaires, les Folies-Bergère jouent de cette attirance-répulsion de la part d’un public bourgeois. Elles semblent ainsi s’offrir, dès lors, comme un espace « entre-deux », hybridant les mondanités « select », dans lesquelles on se doit de se montrer, et les pratiques érotiques et/ou vénales.

LE PROMENOIR OU LA PORNOGRAPHIE... EN MARCHE

3Le premier établissement baptisé « Folies-Bergère » en 1869, sous la direction de Boislève, ne comporte pas de promenoir, invention du directeur suivant, Léon Sari [4][4]Les spectacles sont interrompus par la guerre, puis par la…, en 1871, qui l’accompagnent d’un grand jardin d’hiver. Les Folies-Bergère sont ainsi classées quelques années plus tard par Flévy d’Urville dans la catégorie des « théâtres promenoirs [5][5]Flévy d’Urville, Les Ordures de Paris, Paris, Sartorius, 1874,… », appellation qui souligne la multiplication de ces lieux de passage. Le promenoir des Folies-Bergère est fréquenté par « le Tout-Paris des premières et des courses, la crème et le dessus du panier », contrairement aux autres établissements condamnés à un « public interlope [6][6]Auguste Vitu, « Les Folies-Bergère », Le Figaro, 26 juin 1877. ». La destination première du promenoir est de permettre la circulation des spectateurs et d’accueillir les bars, comme celui immortalisé par la célèbre toile de Manet [7][7]Manet, Un Bar aux Folies-Bergère, 1881/1882, a utilisé comme… où le voyeurisme est mis en abîme, grâce au miroir qui se trouve derrière la serveuse. Des vendeuses « avenantes, jolies et coquettes », uniquement, recrutées par le directeur, Sari, doivent faire preuve d’« avantages extérieurs [8][8]Un Monsieur de l’orchestre, « La soirée théâtrale », Le Figaro,… » pour conserver leur comptoir. Le promenoir devient donc rapidement l’espace d’une autre vente que celle des boissons :

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Les femmes galantes se promènent dans les galeries, accostent ouvertement les hommes, tiennent avec eux des conversations obscènes, débattent les prix de leurs faveurs et se laissent faire des attouchements, ce qui est un sujet permanent de scandale pour les personnes qui ne viennent dans ce théâtre que pour assister aux représentations [9][9]Rapport du chef de service des mœurs, 4 octobre 1876, cité par….

5Un clivage s’opère, entre spectateur des beautés scéniques et spectateur des beautés du promenoir – l’un n’excluant d’ailleurs pas nécessairement l’autre. Ce jeu entre regardeurs et regardés, magnifiquement concrétisé dans le miroir peint par Manet, offre l’une des clefs de compréhension à l’attirance éprouvée par le public. La police, qui a surveillé l’établissement dans le cadre du projet réglementariste de la prostitution [10][10]À la fin du XIXe siècle, les débats entre réglementaristes et…, conclut toutefois en faveur du système mis en place aux Folies-Bergère, « rendez-vous de toutes les femmes galantes ou filles plus ou moins soumises qui veulent éviter les dangers du trottoir et racoler en toute sécurité » et où les clients se rendent avant tout pour « peloter et lever des femmes [11][11]Commissaire Clément, lettre au préfet de police… ». Les archives de la police des mœurs notent, dans leur panorama des filles publiques, les noms de celles qui ont eu leurs habitudes aux Folies-Bergère, comme Rissa-Fritz, Charlotte Riel ou Hermance Lejeune. Les ouvrages hygiénistes qui se multiplient à la fin du XIXe siècle évoquent immanquablement les Folies-Bergère, à l’instar du Docteur Paul Martin, qui narre les déboires d’un patient atteint de « chaudepisse » contractée « dans une de ces rencontres [...] des Folies-Bergère [12][12]Docteur Paul Martin, Maladies de l’amour, préservation,… ». Un article du Figaro de 1875 ironise sur la foule compacte agglutinée au promenoir des Folies-Bergère où « la difficulté de circuler augmente en raison directe de l’agrandissement des promenoirs [13][13]« La soirée théâtrale », Le Figaro, 2 mars 1875. ». Le directeur, en homme d’affaires avisé, a rapidement perçu la valeur commerciale ajoutée de la clientèle spéciale du promenoir, qui devait néanmoins s’acquitter du prix d’entrée et contribuait à la réputation de l’établissement.

6Les études sur la société parisienne citent invariablement le music-hall de la rue Richer dans la liste des lieux de prostitution, eu égard à son promenoir, surnommé par Charles Virmaitre « le marché aux veaux », « foire permanente de putains » à tous les prix, mais où « le veau est mieux paré » que sur les boulevards, car « couvert de soie, comme les cochons de bouffettes de rubans, au concours agricole [14][14]Charles Virmaitre, Trottoirs et lupanars, Paris, H. Perrot,… ». L’intérêt des Folies-Bergère est, pour une large part, de proposer des rencontres vénales avec l’apparat d’une soirée mondaine ; en un mot, de sauver les apparences pour une clientèle soucieuse de morale publique. Maurice Delsol, dans son « étude de mœurs parisiennes » au titre pour le moins alléchant de Paris-Cythère, détaille les itinéraires des « horizontales » qui font « partie du matériel roulant des Folies-Bergère depuis leur fondation [15][15]Maurice Delsol, Paris-Cythère. Étude de mœurs parisiennes,… ». Les clients du promenoir se voient proposer de consommer quelques boissons onéreuses – du champagne, la plupart du temps – en compagnie de ces demoiselles, puis de poursuivre la soirée ailleurs, après avoir contemplé les charmes encore quelque peu habillés des entraîneuses, qui viennent « lever un michet [16][16]Bookwormn, « Michet », L’Intermédiaire des chercheurs et… ».

7Un ouvrage anonyme, intitulé Les Trucs de ces dames : confession d’une horizontale[17][17]Les Trucs de ces dames : confession d’une horizontale, Paris,…, livre les secrets de Lucienne pour « raccrocher » un client, les enchères charnelles à la sortie du music-hall et les propositions de lesbiennes qui hantent également les lieux. Huysmans se souvient de la « vapeur chaude », « mélange d’exhalaisons de toute sorte », « l’odeur du cigare et de la femme [18][18]Joris-Karl Huysmans, Croquis parisiens, Paris, P.V. Stock,… » de ce promenoir, où la circulation est rendue difficile par le nombre de clients. Il pointe encore la supériorité des Folies-Bergère sur ses concurrents, « unique » dans « le cachet boulevardier [...] d’un goût outrageux et exquis ». Le savant dosage entre esprit canaille et cachet mondain offre à l’établissement son caractère spécifique.

8Ce promenoir qui « a causé la ruine des établissements tolérés et l’enrichissement des médecins spéciaux » excite la verve de Bérenger, qui le place en tête de sa liste noire parce qu’il donne « libre carrière à la pornographie » et qu’il appartient aux « véritables entreprises de licence », aux « fabriques d’obscénité », en aidant « la galanterie vénale à s’étaler partout, la haute prostitution à régner en maîtresse [19][19]Téramond, « L’immoralité au café-concert », L’Art lyrique et le… ». Sa notoriété excède très rapidement les frontières de la capitale, pour hanter les imaginations provinciales et étrangères ; le mythe de « la moderne Corinthe », du « temple cythéréen » où les femmes « viennent faire leur premier quart dans le promenoir [20][20]Passe-Partout, « Les scènes populaires », La Lanterne,… » est né. Et curieusement, si d’autres lieux possèdent un espace identique, c’est bien le promenoir des Folies-Bergère qui s’affirme comme emblématique de plaisirs des sens, voire comme emblème de la luxure parisienne. La pièce de Feydeau, La Duchesse des Folies-Bergère (1902), incarne, dans le personnage de la Môme Crevette, alias la Duchesse, tous les plaisirs interdits et l’ambivalence d’une société aristocratique qui se construit parfois sur des passés peu glorieux, du Moulin-Rouge (dans la Dame de chez Maxim, 1889) aux Folies-Bergère. La dualité de ces femmes, encore une fois, symbolise celle des Folies-Bergère.

9Le « trottoir à couvert » abrite en effet « messieurs gais et femmes tristes, gommes et fards, Alphonses et marchandes d’amour, petits jeunes gens dont c’est la préface et vieilles cocottes fourbues dont c’est le post-scriptum ; maris en rupture de chaîne et ouvrières en rupture d’atelier » qui « s’entrecroisent, s’enlacent, s’interpellent, se toisent, se négocient [21][21]Pierre Véron, Côté du cœur. Paris vicieux, Paris, E. Dentu,… ». C’est « une halle pure et simple » où les « habituées » viennent « giboyer [22][22]Pierre Véron, « Courrier de Paris », Le Monde illustré,… », un « ignoble bazar [...] puant le vice [23][23]François Coppée, « Mœurs parisiennes. Une soirée aux… » pour François Coppée, pourfendeur des mœurs parisiennes dissolues. Les Folies-Bergère attirent par conséquent la clientèle aisée de la capitale et deviennent « l’Éden des provinciaux » et « le cauchemar, la terreur de toutes les dames des départements », qui, avant le départ de leur époux pour Paris, lui intiment « Jure-moi que tu n’iras pas aux Folies-Bergère [24][24]Un Monsieur de l’orchestre, « La soirée théâtrale », Le Figaro,… ! » C’est aussi « la première visite d’un étranger libidineux qui arrive à Paris [25][25]Sar I, « Folies-Bergère », L’Art lyrique et le music-hall,… », une étape qu’on se doit d’inscrire à son périple. Georges Duroy et sa fréquentation des Folies-Bergère transcrit, pour le lectorat de l’époque, un usage tout à fait connu [26][26]Dans Bel-Ami, publié par Maupassant en 1885, Georges Duroy est… ; les artistes, auteurs ou peintres, portent un regard plein d’intérêt à ce Paris noctambule, bouillonnant de mille plaisirs et centre de personnages tous plus excentriques et originaux les uns que les autres.

10Le promenoir est donc l’emblème de la déperdition et de la dissolution des mœurs, notamment en province, mais, pour cette raison même, il attitre invariablement une clientèle massive. On s’offusque en public de l’obscénité des Folies-Bergère, on rêve en secret aux charmes interdits des « raccrocheuses » du promenoir. Certains hommes, trop refrénés par la morale bourgeoise pour passer à l’acte, se contentent de déambuler et de frissonner par procuration au spectacle des pourparlers charnels et des toilettes affriolantes. Consommateurs et curieux se mêlent dans les couloirs. Francisque Sarcey, chantre de la morale, note ainsi qu’il est « difficile aux femmes de passer une soirée [27][27]Francisque Sarcey, « Chronique théâtrale », Le Temps,… » dans ce lieu et, ce faisant, alimente le mythe. Quelques années plus tard, la direction opte pour une formule mixte, avec des matinées dites « de famille », durant lesquelles « le promenoir et les bars [sont] supprimés [28][28]Nicolet, « Courrier des spectacles », Le Gaulois,… ». Les actrices et courtisanes de haut vol fournissent aussi les bataillons féminins qui peuplent les Folies-Bergère et contribuent à créer une atmosphère sensuelle ou obscène – selon les observateurs – qui déborde le promenoir pour investir la scène.

ACTRICES, COCOTTES ET GRANDES HORIZONTALES

11Flaubert, dans le Dictionnaire des idées reçues, donne pour définition au mot « actrice » : « La perte des fils de famille. Sont d’une lubricité effrayante, se livrent à des orgies, avalent des millions, finissent à l’hôpital [29][29]Gustave Flaubert, Dictionnaire des idées reçues, Paris,… ». La confusion entre théâtre et demi-monde est récurrente et les interprètes du music-hall contribuent largement à l’entretenir, soutenus par une production littéraire qui ne cesse de renforcer cette collusion [30][30]Le narrateur des Lauriers sont coupés, d’Édouard Dujardin…. Henry Buguet, dans Gaudrioles et flons-flons, évoque la chanson d’« une horizontale », intitulée Le Travail de nuit, dans laquelle un couplet annonce « De l’Éden aux Folies-Bergère, Jusqu’à minuit je cherche un daim ; Puis, toute la nuit à Cythère, Je suis esquintée jusqu’au matin... [31][31]Henry Buguet, Gaudrioles et flons-flons. 65 chansons avec… ». Alain Corbin a montré les liens entre codification rigoureuse à l’extrême de la vie conjugale et développement du « mythe » de la courtisane, libérée des contraintes de l’épouse vertueuse, emblème d’une vie agréable, gaie, construite sur le désir. Les « filles » hantent les imaginations et les productions littéraires [32][32]Voir Laure Katsaros, Un Nouveau Monde amoureux. Célibataires et…. Leur vie, spectaculaire, fastueuse, faite de scandales, de liaisons aristocratiques, de robes et bijoux de prix, est mise en abyme sur la scène des music-halls, des casinos et restaurants à la mode ; les « cocottes » prennent la relève des « lionnes » et des « biches » de la « fête impériale », dont Émile Augier et Édouard Foussier ont dressé le portrait (Les Lionnes pauvres, 1858). Dans La Première fois (1887), René Maizeroy narre les aventures de Linine Ablette, surnommée par les « Folies-Bergère, l’Élysée, dans les cafés du boulevard » « la Dormeuse », parce que cette « fille » s’endort régulièrement, laissant ses amants d’un soir partir « sans même laisser deux sous sur la cheminée [33][33]René Maizeroy, La Première Fois, Paris, Dentu, 1887, p. 91. ». Elle racole dans divers lieux nocturnes parisiens, mais ne fait pas partie des célébrités du demi-monde qui sont, elles, amenées à paraître sur scène.

12Force est de reconnaître que l’engagement de cocottes notoires aux Folies-Bergère corrobore l’association entre art théâtral et art amoureux. Les archives de la police des mœurs notent ainsi que Marie Lemaoût, en 1873, a « joué quelques bouts de rôle aux Folies-Bergère » tout en « se prostituant au premier venu [34][34]Gabrielle Houbre, ouvr. cité, p. 409. » – pratique assez courante des figurantes et des modestes interprètes, incapables de vivre de leurs maigres cachets. La Rachel de Proust, dans À la recherche du temps perdu, initie sa carrière dans une maison de passe, avant de débuter sur les planches ; Lucy Rocher, héroïne d’Une Comédienne, scènes de la vie au théâtre, d’Henry Bauer (1889), alterne ses prestations au Conservatoire et au sein d’une maison close. L’ouvrage d’Anne Martin-Fugier, consacré aux actrices du XIXe siècle, analyse ainsi les difficultés financières qui les obligent à « recourir à la galanterie » et à « tirer leurs revenus de leurs charmes [35][35]Anne Martin-Fugier, Comédiennes. Les actrices en France au XIXe… » plus que de leurs engagements dramatiques. Camille Mauclair, dans le Soleil des Morts (1898) présente quant à lui le personnage d’une chanteuse, Lucienne Lestrange, qui devient progressivement une vedette du music-hall. Incarnation de la femme-perdition, la chanteuse aux multiples amours concentre les failles et les atouts des cocottes au sein d’une société bourgeoise incontestablement fascinée autant que repoussée par cet univers.

13Cependant, le music-hall de la rue Richer a principalement usé de la notoriété de courtisanes célèbres comme arguments publicitaires. Le music-hall devient un débouché nouveau, à la toute fin du XIXe siècle, pour « les beautés professionnelles – et il faut ici donner au mot toute sa force – qui recherchent la « situation d’“artiste” et les applaudissements [36][36]Jacques du Tillet, « Au jour le jour – L’amour de l’art », Le… ». Publicité facile pour les Folies-Bergère, visibilité élargie pour les demi-mondaines, chacun trouve son compte dans cet arrangement, y compris un public ravi de pouvoir contempler celles dont les charmes sont bien au-dessus de ses moyens ou jugés incompatibles avec un souci de respectabilité affichée. Ainsi, Émilienne d’Alençon obtient-elle la vedette dans le ballet-pantomime composé par Courteline et Marsolleau, Émilienne aux Quat’z’arts, en 1893. Vêtue d’un « costume suggestif [37][37]« Tablettes théâtrales », Le Matin, 10 décembre 1893. » elle déchaîne l’enthousiasme du public, venu en masse pour ses débuts, qui constituent l’événement du moment [38][38]Voir Frimousse, « La soirée parisienne », Le Gaulois,…. Engagée par Abel Tarride pour une tournée avant ses dix-huit ans (qu’elle fuit pour courir l’aventure avec un beau Tzigane), elle passe ensuite au cirque Franconi et se fait connaître, plus que pour son numéro de lapins acrobates, par ses relations amoureuses, dans lesquelles figure notamment le duc d’Uzès. Aux Folies-Bergère, elle se montre « dans le plus coquet déshabillé », qui était plus explicite à la répétition générale, mais qui a subi les foudres de la censure, puis « uniquement d’un grand chapeau et d’une jarretière [39][39]Frimousse, « La soirée parisienne », ibidem. ». L’affiche réalisée par Jules Chéret montre Émilienne d’Alençon en bustier décolleté, jupe transparente laissant entrevoir les cuisses, aux côtés d’un homme débraillé, vraisemblablement victime d’un « coup de chaud », reflet des émotions procurées au spectateur des Folies-Bergère.

14Liane de Pougy, « une des belles minettes les plus en train du joyeux bataillon de Cythère », « cette blonde dégraffée [sic] dont les frasques amoureuses alimentèrent maintes fois la chronique des journaux mondains dans les filets réservés à la haute bicherie [40][40]« Chronique du dimanche. Exploits de belle minette », La… », se produit aux Folies-Bergère en 1894. De son vrai nom Anne-Marie Chassaigne, originaire de la Sarthe, elle a pu débuter grâce à son réseau galant, dont font partie Charles de Mac-Mahon, le vicomte de Pougy – auquel elle va emprunter nom et titre – le peintre Jean Béraud, l’auteur Félicien Champsaur ou encore Henri Meilhac [41][41]Voir Richard Balducci, Les Princesses de Paris. L’âge d’or des…. Elle a été formée par Valtesse de la Bigne, inspiratrice de la Nana créée par Zola et serait le modèle d’Odette de Crécy chez Proust [42][42]Selon Jean Chalon, Liane de Pougy. Courtisane, princesse et…. Amie de Jean Lorrain, qui annonce leur futur mariage en 1900 comme celui de « Sodome et Gomorrhe [43][43]Voir Phillip Winn, Sexualités décadentes chez Jean Lorrain. Le… », elle manie en virtuose sa réputation sulfureuse. Auréolée de scandales amoureux à répétition, de conquêtes en tout genre, du « luxe de ses équipages et de la profusion de ses bijoux [44][44]Frimousse, « La soirée parisienne », Le Gaulois, 15 avril 1894. », Liane de Pougy propose rue Richer un numéro de prestidigitation. Les colonnes des journaux avaient relaté, les années précédentes, les ruines causées par Liane de Pougy à ses célèbres protecteurs, avec des allusions pour le moins transparentes à sa sexualité. C’est donc précédée d’une légende pornographique qu’elle paraît sur scène, face à un public dont l’horizon d’attente est surtout sensuel. Cette « liane pour sa souple beauté dans ses enlacements » a « tendu sa toile sur Paris » où « les moucherons se prennent, fascinés, englués [45][45]Georges Montorgueil, Les Parisiennes d’à présent, Paris, H.… » défraie encore la chronique en vendant aux enchères sa « friperie intime », dont des « fanfreluches dont elle s’est servie [...] en ses heures les plus... secrètes [46][46]Lionnette, « Le Carnet de Lionnette », La Lanterne,… ». Les amours lesbiennes de Liane, avec Valtesse de la Bigne, puis Natalie Clifford Barney, mais aussi Émilienne d’Alençon [47][47]Voir Catherine Guignon, Les Cocottes. Reines du Paris 1900,…, ajoutent un piment supplémentaire à la figure déjà sulfureuse de la femme conquérante qui monnaie ses faveurs, en alimentant un fantasme masculin exploré par la littérature, en particulier depuis le roman-feuilleton d’Adolphe Belot, Mademoiselle Giraud, ma femme (1870). Jean Lorrain a contribué à répandre l’image d’un Lesbos moderne parisien dans ses articles parus au Courrier français, intitulés « Paris vicieux [48][48]Jean Lorrain, « Paris vicieux. Fragment de lettre », Le… », de même que Maizeroy avec Deux Amies (1885), Pierre Louÿs avec les Chansons de Bilitis (1894) ou Félicien Rops dans ses réalisations plastiques (Lesbos, 1878-1890), faisant de la tribade un sujet qui nourrit l’imaginaire poétique. Les courtisanes, « dînant de Cythère, et soupant de Lesbos [49][49]Joséphin Péladan, La Gynandre, cité par Nicole G. Albert,… », amènent dans les établissements qu’elles fréquentent cet univers érotique, bisexuel et transgressif ; elles soulignent, ce faisant, cet « entre-deux », qui semble constitutif de l’image même du music-hall, en général, et des Folies-Bergère, en particulier.

15Autre gloire de la « féminine Galanterie française [50][50]La Caverne, « Théâtralités », Le Moderniste illustré, n° 8,… », la belle Otero « qui s’exhibe tous les soirs aux Folies-Bergère, devant une salle comble, pour le plus grand agrément des amoureux de la plastique [51][51]Tout-Paris, « Bloc-notes parisien », Le Gaulois, 7 avril 1894. ». Cette « authentique fille de bohémienne », « rapidement devenue reine de Paris-Plaisirs », condense les bravos de la salle pour « la passion charnelle [52][52]Édouard Beaudu, « Parades rythmées et danses au music-hall »,… » qu’elle exprime sur scène. Espagnole arrivée à Paris en 1889, avec à son actif de nombreuses aventures amoureuses, elle fait ses débuts au Grand Véfour avant d’être engagée par Franconi, puis débauchée du Wintergarten de Berlin par Marchand – alors directeur des Folies-Bergère – pour une coquette somme [53][53]Charles Castle, La Belle Otero, la dernière grande courtisane,…. Comme Liane de Pougy, elle expose les bijoux offerts par ses admirateurs et amants, dont les affiches n’omettent jamais de révéler la brillance, et « exécute des pas espagnols [54][54]« Notes de la semaine », Les Annales politiques et littéraires,… » qui sont appréciés pour leur potentiel lascif. Les journaux ont multiplié les articles sur ses liaisons et sur les déboires de certains hommes éconduits, comme un jeune sous-officier qui, ayant reçu une petite somme en héritage, la dilapide pour couvrir sa belle de bijoux et finit par se suicider devant sa froideur [55][55]Francisque Sarcey, « Notes de la semaine », Les Annales…. Sa « déplorable tenue en scène [56][56]Gal, « Dans les music-halls », L’Art lyrique et le music-hall,… » concourt à son succès, tout comme sa réputation.

16Mais un certain public, s’il peut tolérer cette « gloire qui provoque naturellement le tapage », s’offusque à grand bruit de l’annonce d’un nouveau numéro rue Richer : celui de Clara Ward, compagne du violoniste tzigane Rigo, ex-princesse de Chimay [57][57]Clara Ward, américaine, a épousé le prince belge de…. Le préfet de police, face à la fronde grandissante, avait instamment prié l’artiste de renoncer aux « pompeuses poses plastiques » prévues aux Folies-Bergère, parce qu’il « y a tout de même des choses que le boulevard n’admet pas [58][58]Santillane, « Les chahuts au théâtre », Gil Blas, n° 6360,… ». Ce que l’on ne peut pardonner à Clara Ward, ce n’est pas « la nudité de la femme, mais d’une certaine femme, publique par ses gestes et princesse authentique ». Georges Montorgueil souligne, à juste titre, l’hypocrisie qui se targue par voie de presse de lancer une « revanche de la moralité » alors que « la feuille de location dépassait vingt mille francs [59][59]Georges de Montorgueil, ouvr. cité, p. 121. ». Il est vrai que les journalistes, si prompts à commenter gauloisement les détails des déshabillés scéniques des interprètes et de leurs multiples liaisons, récusent unanimement la venue de Clara Ward, « une attraction qui n’a rien d’artistique » et qui repose sur « le cocuage [60][60]Valérien Tranel, « Causerie hebdomadaire », L’Art lyrique et le… ». On ne badine ni avec les titres de noblesse véritables – les titres fantaisistes sont légion au music-hall – ni avec la fidélité de l’épouse. Toutefois, cette vertu n’atteint pas les programmes des Folies-Bergère, qui se doivent de convier le public au dépaysement des sens. Les numéros isolés des demi-mondaines ont une vertu apéritive, le plat de résistance de la soirée égrillarde réside dans le ballet, qui n’exclut pas cette co-présence du soufre et du poétique.

LA CHAIR EN SCÈNE

17Le contexte de censure et la loi de 1882 sur « l’outrage aux bonnes mœurs [61][61]Voir Pascal Ory (dir.), La Censure en France à l’ère… », qui vise notamment la pornographie, paraît peu propice aux scènes érotiques. Si la censure préalable sur les chansons restreint la loi sur la liberté de la presse de 1881, le public mondain des Folies-Bergère explique la tolérance dont les autorités font preuve envers les programmes [62][62]Voir Élisabeth Pillet, « Cafés-concerts et cabarets »,…. On peut également y lire la traduction du paradoxe entre sévérité de la loi contraignant les prostituées à exercer en lieu clos et surabondance de leur représentation dans le champ artistique. Les tableaux de Manet, Courbet, Degas et bien sûr Toulouse-Lautrec mettent en scène les courtisanes, filles de rue ou demi-mondaines et sont exposés publiquement [63][63]Les Baigneuses de Courbet, La Fête de la patronne de Degas,…. Nombre d’artistes, d’ailleurs, aux premiers rangs desquels figure Toulouse-Lautrec, sont intimement associés au demi-monde.

18Les titres des spectacles constituent déjà une invitation, une mise en bouche des plaisirs que le spectateur peut attendre. Certes, ils seront plus racoleurs encore dans la première moitié du XXe siècle, mais La Haute Gomme (octobre 1883), Merveilleuses et Gigolettes (décembre 1894), la Princesse au Sabbat (janvier 1899), les Grandes Courtisanes (mai 1899), le Prince Désir (novembre 1899) ou Cythère (avril 1900) se lisent sans aucune ambiguïté. La Princesse au Sabbat montre ainsi « des nudités », « des voluptueuses grivances », « des bêtes immondes » qui donnent « un simulacre d’hyménée [64][64]La Cagoule, « Visions de notre heure : choses et gens qui… ». D’autres, qui ne laissent présager aucune volupté particulière, se révèlent toutefois aussi suggestifs dans leur pouvoir érotique. Ainsi, la Jonquina, « ballet japonais dans lequel les danseuses sont par trop légèrement... vêtues [65][65]A. de Mandre, « Folies-Bergère », La Comédie, n° 21,… » recueille largement les applaudissements. Le programme de 1875 se fait fort d’apprendre au lecteur que « la Jonquina est, au Japon, un divertissement de femmes réunies pour passer une après-midi agréable. On s’évente, puis on danse, et comme, en dansant, on a chaud, au fur et à mesure que la danse s’accentue les danseuses se dévêtissent [66][66]Un Monsieur de l’orchestre, « La soirée théâtrale », Le Figaro,… ». À l’instar des exhibitions anthropologiques qui couplent connaissance scientifique et nudité, pour le plus grand plaisir du public, le music-hall se targue de présenter une forme culturelle inconnue, qui donne lieu à d’émoustillants déshabillages.

19Le déshabillage va connaître aux Folies-Bergère – et sur d’autres scènes de théâtre et de music-hall – ses heures de gloire dans le dernier quart du XIXe siècle. Les docteurs Witkowski et Nass, auteurs de l’essai sur le Nu au théâtre, placent son origine aux Folies-Bergère, mais en 1886, dans ce qui est historiquement considéré comme la première revue de music-hall, Place au jeûne :

20

Deux demi-mondaines, en costume de ville, accusant les ondulations de leurs lignes courbes, s’invectivent pour un motif futile, [...] et vident leur différend, séance tenante, sur le trottoir – leur terrain familier. Elles se dévêtissent, mais gardent leur chemisette. Le public [...] criait chaque soir : “Encore ! Encore !” Les duellistes faisaient tomber les épaulettes de dentelles et le galbe du torse apparaissait dans toute sa vérité... recouverte d’un fin maillot couleur chair, qui faisait illusion [67][67]Docteurs Gustave-Joseph Witkowski etLucien Nass, Le Nu au….

21Le Réveil d’une parisienne, en 1894, permet au public d’assister au « suggestif spectacle » de « la dextérité vraiment prodigieuse » avec laquelle Mlle de Presles procède à sa toilette matinale : « taffetas blanc brodé à jour sur transparent rose », « les bas. En soie noire, avec jarretières couleur chair », « la chemise de jour », « le corset, un rêve ! » et « le jupon. En satin blanc recouvert de mousseline de soie [68][68]« La soirée théâtrale », Le Figaro, 1er juin 1894. ». Certes, « le public des Folies-Bergère se retire un peu déçu », car « en dépit de l’austérité des mœurs, il ne lui déplairait pas que Mlle de Presles se montrât moins réservée », mais « il y a dans la salle un frémissement » et on règle « la portée des lorgnettes [69][69]Hector Pessard, « Le lever d’une Parisienne », Le Gaulois,… » pour saisir le moindre soupçon de chair. Hector Pessard a beau pester contre l’« acheminement aux impudiques réalités scéniques », la perte générale du « sens de la moralité et de la pudeur », la salle est comble chaque soir. L’un de ses confrères du Gaulois affirme d’ailleurs qu’« en matière de pornographie, l’obscénité brutale est moins brutale que le demi-voilé » et qu’« un lever ou un coucher de Parisienne » causera, à n’en pas douter, la perte des « collégiens en vacances » et des « hommes mûrs » chez qui le spectacle devrait réveiller « l’affreux cochon que chacun porte en soi [70][70]Gaston Jollivet, « Paris en chemise », Le Gaulois,… ».

22L’érotisme et la sensualité de la scène, plus suggestive que franchement « naturaliste », sont ici en cause. Dès 1882, le journal satirique La Caricature soulignait avec humour le goût de plus en plus affirmé pour les nudités sur scène, indiquant que la direction des Folies-Bergère, suite aux sollicitations du public, avait décidé en assemblée générale que « les maillots sont supprimés » et que « la nature seule fournira désormais aux actrices les charmes dont elles ont besoin [71][71]« Réforme théâtrale », La Caricature, 6 mai 1882. ». Il est vrai que des spectacles tels que Sur la plage (1883) permettent d’offrir aux spectateurs une « variété de costumes de cocottes, de gommeux ». Le ballet Fleur de Lotus, dix ans plus tard, présente quant à lui « Mlle Micheline, qui n’a pas craint de prendre son bain devant des centaines de lorgnettes [72][72]« Courrier des théâtres », Le Figaro, 26 mars 1893. ». Après le lever et le coucher, le cabinet de toilette et le bain de mer sont utilisés comme prétextes à des semi-nudités, ou tout du moins à un « déshabillé des plus suggestifs [73][73]« Tablettes théâtrales », Le Matin, 28 mars 1893. ». Incontestablement, les plastiques de ces dames sont plus importantes que leurs prouesses chorégraphiques. Ces corps affriolants servent les thèmes érotiques qui progressent irrésistiblement dans la dernière décennie du XIXe siècle. Ainsi, le ballet Phryné (1896), qui recourt à l’élément antique, est-il jugé comme « le moyen le plus simple qu’on ait trouvé [...] pour exhiber des cuisses nues sans que la police exige l’apposition à la porte d’une lanterne [74][74]Ryvez, « Dans les music-halls », L’Art lyrique et le… ». Le titre, jouant sur la référence à l’hétaïre grecque, allie le fantasme de l’amour vénal et la caution historique, l’une des formules plébiscitées par le public et par la direction des Folies-Bergère. Un compte rendu n’hésite pas à stigmatiser « le tenancier des Folies-Bergère », les « malsaines habitudes de la maison » et sa « clientèle de vieux marcheurs », qui, avec Phryné, donne du travail au « petit appareil pornographique que tout homme porte avec soi [75][75]L’Art lyrique et le music-hall, n° 1-102, 1896-1897. ». La danseuse chargée du rôle-titre, Jane Margyl, est perçue comme « belle, sculpturale, charnue, appétissante, incendiaire » et dévoile « ses formes impeccables dans toute leur splendide nudité », tant et si bien que le journaliste s’inquiète pour « les âmes candides qui vont dormir seules après de si troublantes exhibitions [76][76]Ténarg, « Folichonneries Théâtre », Folichonneries, n° 4,… ».

23L’Araignée d’or, sur un livret de Jean Lorrain, « conte de poète » écrit « pour cette jolie femme [77][77]Le M. du B., « Concerts et spectacles. La soirée », Le Figaro,… » qu’est son amie Liane de Pougy (1896), distille savamment la teneur poétique et les plaisirs plastiques de l’interprète principale. L’insistance des critiques sur le corps, la « belle vision » de cette « ravissante artiste [78][78]Des Planches, « Courrier des théâtres », La Presse, n° 1456,… » se plaît aussi à rappeler, à cette occasion, que cette symbolique araignée, couverte d’or par ses nombreux amants fortunés, « a tendu sa toile sur Paris », où « les moucherons » sont « fascinés, englués » afin qu’elle « suce [leur] or [79][79]Georges Montorgueil, ouvr. cité, p. 6. ». Ce « conte féerique » où elle compose un rôle muet montre bien à quel point sa présence en tant que « reine du plaisir » sacrée sur « le théâtre du monde où l’on s’amuse [80][80]Henri Nicolle, « Liane de Pougy », La Revue illustrée, vol. 22,… » surpasse tout autre intérêt pour le public. La Légende d’Amadis et de la fée Oriane, composée par Jean Lorrain en 1896 [81][81]La première version, Oriane, est publiée en 1893, puis reprise… et reprise dans l’Araignée d’or, allie l’atmosphère fabuleuse et les suggestions érotiques, le personnage de la fée étant nu, en proie à de voluptueux fantasmes, concrétisés sur scène par les mimes de Liane de Pougy.

24Mise en abyme des pratiques de la rue Richer – ou hommage rendu – le ballet Les Grandes courtisanes (1899) associe également l’histoire et la beauté féminine, où « Mlle Thylda, belle à damner tout l’Olympe [82][82]« Tablettes théâtrales », Le Matin, 14 mai 1899. », rivalise avec « Odette Valéry, danseuse aux lignes troublantes [83][83]Strapontin, « Paris la nuit. Aux Folies-Bergère », Gil Blas,… ». La pratique du panorama historique de la galanterie commence fin XIXe siècle et ne cessera de donner lieu à des spectacles fastueux. Les Folies-Bergère tendent ainsi, en quelque sorte, un miroir à la grivoiserie, toujours présentée comme typiquement parisienne pour le public étranger. L’esprit qui gouverne la composition de Cythère (1900) est semblable : une jeune ingénue va être déniaisée par une société d’étudiants, jusqu’au moment où Cupidon conduit toute la troupe à Cythère, où l’ingénue va être initiée aux « doux mystères ». « Ce n’est peut-être pas très moral [84][84]Addé, « Soirée parisienne. Cythère aux Folies-Bergère », Le… », avoue le journaliste du Gaulois, mais le public des Folies-Bergère attend ce type de « suave composition », « délicate et aphrodisiaque, pastorale et pimentée [85][85]G. de Villette, « Aux Folies-Bergère. Cythère », Gil Blas,… ». Précisons toutefois que l’établissement met à profit, de façon plus générale, une thématique largement exploitée par les peintres, romanciers et dramaturges.

25L’équipe artistique des Folies-Bergère a multiplié les sujets propres à produire des poses plastiques et dénudées, s’inspirant au passage des réalisations romanesques, dramatiques ou picturales. L’histoire occupe une place de choix dans les programmes, de même que l’époque contemporaine, en particulier la Parisienne et ses activités de prédilection – bains, toilette, mode, danse. Les danseuses anonymes ou à la célébrité éphémère contribuent très largement à la spectacularisation des corps et à l’érotisme latent des ballets. Signalons enfin la pantomime en deux actes de René Maizeroy, donnée en 1892, Le Miroir. Le titre nous paraît plus symptomatique que l’intrigue, centrée sur le personnage de Pierrot amoureux de la bergère Nivette : il évoque le phénomène de réflexion, sur les planches, d’une société en mal de divertissement, oisive, qui vient chercher dans ce type de lieu une échappatoire à l’ennui, une stimulation sensorielle. La préface écrite à l’occasion s’adresse ainsi aux « indifférents » et aux « blasés » et leur propose comme « remède » un « assaisonnement des joies [86][86]René Maizeroy, Le Miroir, Paris, Ollendorff, 1892, p. X. La… ». Les mets épicés des Folies-Bergère, plus pimentés encore que les menus déjà fort relevés des concurrents, ont, en effet, construit leur légende.

CONCLUSION

26Sari, directeur emblématique des Folies-Bergère, décida, en 1881, de « moraliser » l’établissement, avec « des concerts de musique sérieuse » ; cependant, « les habitués n’apprécièrent pas [87][87]« Tribunaux », Le Matin, 22 février 1883. » et, au bout de quelques mois, « les Folies-Bergère en sont revenues à leurs premières amours », car « n’est pas honnête salle qui veut [88][88]« Paris et départements », Le Ménestrel, n° 27, 5-11 juin 1881. ». L’anecdote est révélatrice des attentes du public et des modalités spectaculaires du music-hall de la rue Richer. Alain Corbin a analysé la modification du désir masculin pour la femme vénale, dont l’homme attend moins, à la toute fin du XIXsiècle, la proposition flagrante que le « simulacre de séduction [89][89]Alain Corbin, « La rencontre des corps », Histoire du corps,… ». Avec son promenoir, où l’on est censé consommer des boissons et déambuler durant l’entracte, ses demi-mondaines qui s’illustrent dans des numéros artistiques, ses ballets aux sujets toujours excitants, les Folies-Bergère concrétisent parfaitement le fantasme pornographique et l’illusion de respectabilité. Espace de l’« entre-deux » par excellence, l’établissement s’offre tel un miroir de ce « demi-monde », entre érotisme et sortie mondaine ; de même il semble conjuguer le réel de la vie sociale bourgeoise et le spectaculaire, d’où vraisemblablement la prédilection de la littérature pour ce lieu atypique, berceau d’intrigues, microcosme de la communauté, qui révèle enfin la « crise » de l’identité masculine face aux revendications affirmées des femmes [90][90]Voir Annelise Maugue, L’Identité masculine en crise au tournant…. Certes, l’établissement n’est pas le seul music-hall de cette envergure, même s’il est le plus ancien ; ses programmes ne diffèrent pas foncièrement de ceux de ses concurrents directs – le Moulin-Rouge, le Casino de Paris, l’Olympia – où les femmes nues sur scène et les courtisanes dans la salle sont également présentes. Les Folies-Bergère paraissent toutefois cristalliser dans l’esprit public l’hybridation parfaite entre réputation mondaine et odeur de soufre, « grand monde », bohème artistique et demi-monde, au point de constituer l’emblème de cette fascination du siècle pour les espaces et personnages équivoques.

27Le public mondain, parisien, provincial et étranger, peut à loisir jouir des allusions érotiques des spectacles, des corps de danseuses scrutés au moyen de la précieuse lorgnette, ou bien profiter du « jardin d’hiver entouré de logettes dont les sophas [sic] sont abrités derrière de discrets paravents [91][91]Maurice Delsol, Paris-Cythère, ouvr. cité, p. 218. ». En dépit de la notoriété du promenoir et de ses « marcheuses » au comportement parfois peu discret, la pornographie goûtée aux Folies-Bergère est couverte d’un voile de légitimité artistique. Le meilleur exemple en est, sans doute, la présence des courtisanes et autres horizontales célèbres, que la morale publique réprouve et qu’on admire inconditionnellement lorsqu’elles se produisent sur scène. S’il est de bon ton parmi eux de mépriser ouvertement les « bastringues » des quartiers, les spectateurs chics se pressent rue Richer où le luxe de la décoration, des costumes, le prix d’entrée et la célébrité des vedettes procurent une satisfaction des sens tout en apaisant les principes moraux. Ici réside vraisemblablement l’une des clefs du succès et de la longévité des Folies-Bergère : la pratique acrobatique – comme l’y invite la spécialisation chorégraphique et gymnique de l’établissement – d’un grand écart entre pratiques sulfureuses et spectacles familiaux, entre public interlope et public mondain.

Notes

  • [1]
    À la fin du XIXe siècle, les rubriques consacrées aux arts du spectacle distinguent les « théâtres » et les « théâtres où l’on fume », qui désignent les music-halls, cabarets et cafés-concerts. L’expression devient rapidement synonyme de lieu masculin, où la vertu des dames est offusquée tant par la présence de la fumée que par celle de demi-mondaines.
  • [2]
    Bérenger, sénateur inamovible à partir de 1875, est connu pour avoir mené un combat relayé par la presse contre la licence des rues et des spectacles, le néo-malthusianisme et la traite des blanches.
  • [3]
    La Dame aux camélias, roman publié en 1848, adapté au théâtre en 1852, et le Demi-Monde, comédie de 1855, ont familiarisé le public avec cet univers.
  • [4]
    Les spectacles sont interrompus par la guerre, puis par la Commune. Sari, propriétaire des Délassements-Comiques, reprend la direction des Folies-Bergère après la Commune.
  • [5]
    Flévy d’Urville, Les Ordures de Paris, Paris, Sartorius, 1874, p. 150. Font partie de cette catégorie le Casino-Cadet ou l’Elysée-Montmartre, par exemple.
  • [6]
    Auguste Vitu, « Les Folies-Bergère », Le Figaro, 26 juin 1877.
  • [7]
    Manet, Un Bar aux Folies-Bergère, 1881/1882, a utilisé comme modèle Suzon, qui travaillait aux Folies-Bergère, tandis que la toile, elle, fut réalisée dans l’atelier du peintre. Voir Jack Flam, Manet : un Bar aux Folies-Bergère ou l’abysse du miroir, Paris, L’Échoppe, Jeanne Bouniort (trad.), 2005.
  • [8]
    Un Monsieur de l’orchestre, « La soirée théâtrale », Le Figaro, n° 226, 14 août 1878.
  • [9]
    Rapport du chef de service des mœurs, 4 octobre 1876, cité par Gabrielle Houbre, Le Livre des courtisanes. Archives secrètes de la police des mœurs, 1861-1876, Paris, Tallandier, 2006, p. 34.
  • [10]
    À la fin du XIXe siècle, les débats entre réglementaristes et abolitionnistes se poursuivent, mais le projet réglementariste, qui contrôle, encadre et surveille l’activité des prostituées fichées, domine. Cependant, la prostitution clandestine, dont fait partie celle qui s’exerce aux Folies-Bergère, se développe considérablement. Voir Alain Corbin, Les Filles de noce. Misère sexuelle et prostitution au XIXe siècle, Paris, Flammarion, coll. « Champs », 1982.
  • [11]
    Commissaire Clément, lettre au préfet de police du 14 octobre 1877, cité par Gabrielle Houbre, ouvr. cité, p. 34.
  • [12]
    Docteur Paul Martin, Maladies de l’amour, préservation, hygiène, traitement, Paris, E. Kolb, 1892, p. 100. L’hygiénisme se développe considérablement dans la seconde moitié du XIXe siècle et un parallèle est construit entre hygiène corporelle et hygiène morale. Voir Alain Corbin, Le Miasme et la jonquille, Paris, Flammarion, 2008.
  • [13]
    « La soirée théâtrale », Le Figaro, 2 mars 1875.
  • [14]
    Charles Virmaitre, Trottoirs et lupanars, Paris, H. Perrot, 1893, p. 151.
  • [15]
    Maurice Delsol, Paris-Cythère. Étude de mœurs parisiennes, Paris, Imprimerie de la France artistique et industrielle, 1893, p. 219.
  • [16]
    Bookwormn, « Michet », L’Intermédiaire des chercheurs et curieux, n° 357, 23 mars 1883. L’article précise que l’expression est issue de « l’argot des belles clientes des Folies-Bergère ».
  • [17]
    Les Trucs de ces dames : confession d’une horizontale, Paris, Imprimerie Ed. Caété, 1903.
  • [18]
    Joris-Karl Huysmans, Croquis parisiens, Paris, P.V. Stock, 1905, p. 9-10. Il a découvert, comme beaucoup de ses contemporains, les Hanlon-Lees, mimes acrobates anglais, au Folies-Bergère, qui lui ont inspiré l’écriture du Pierrot sceptique.
  • [19]
    Téramond, « L’immoralité au café-concert », L’Art lyrique et le music-hall, n° 1-102, 1896-1897.
  • [20]
    Passe-Partout, « Les scènes populaires », La Lanterne, 26 mars 1878.
  • [21]
    Pierre Véron, Côté du cœur. Paris vicieux, Paris, E. Dentu, 1880, p. 264.
  • [22]
    Pierre Véron, « Courrier de Paris », Le Monde illustré, n° 1393, 8 décembre 1883.
  • [23]
    François Coppée, « Mœurs parisiennes. Une soirée aux Folies-Bergère », Les Annales politiques et littéraires, n° 78, 21 décembre 1884.
  • [24]
    Un Monsieur de l’orchestre, « La soirée théâtrale », Le Figaro, 16 septembre 1876.
  • [25]
    Sar I, « Folies-Bergère », L’Art lyrique et le music-hall, n° 3, 9 février 1896. Le pseudonyme du journaliste joue, bien entendu, sur le nom du directeur emblématique des Folies-Bergère, Léon Sari.
  • [26]
    Dans Bel-Ami, publié par Maupassant en 1885, Georges Duroy est un client assidu du music-hall, où il se lie avec une fille publique, Rachel. Ce personnage est fidèle à la réalité du promenoir, où les « filles » sont aux tarifs les plus bas, contrairement aux courtisanes et cocottes.
  • [27]
    Francisque Sarcey, « Chronique théâtrale », Le Temps, 24 avril 1876.
  • [28]
    Nicolet, « Courrier des spectacles », Le Gaulois, 22 décembre 1887.
  • [29]
    Gustave Flaubert, Dictionnaire des idées reçues, Paris, Éditions du Boucher, 2002, p. 4.
  • [30]
    Le narrateur des Lauriers sont coupés, d’Édouard Dujardin (1887), se ruine pour une comédienne ; Bordenave, directeur du théâtre des Variétés dans Nana de Zola (1880), sert d’entremetteur pour ses pensionnaires.
  • [31]
    Henry Buguet, Gaudrioles et flons-flons. 65 chansons avec monologues, avec musique, airs anciens et nouveaux, Paris, E. Dentu, 1892, p. 106-107.
  • [32]
    Voir Laure Katsaros, Un Nouveau Monde amoureux. Célibataires et prostituées au XIXe siècle, Paris, Éditions Galaade, coll. « Essais », 2010.
  • [33]
    René Maizeroy, La Première Fois, Paris, Dentu, 1887, p. 91.
  • [34]
    Gabrielle Houbre, ouvr. cité, p. 409.
  • [35]
    Anne Martin-Fugier, Comédiennes. Les actrices en France au XIXe siècle, Bruxelles, Éditions Complexe, coll. « Historiques », 2008, p. 319.
  • [36]
    Jacques du Tillet, « Au jour le jour – L’amour de l’art », Le Journal des débats politiques et littéraires, 15 avril 1894.
  • [37]
    « Tablettes théâtrales », Le Matin, 10 décembre 1893.
  • [38]
    Voir Frimousse, « La soirée parisienne », Le Gaulois, 10 décembre 1893. La veille, en effet, le 9 décembre 1893, Auguste Vaillant a lancé sur les députés de la Chambre une bombe. C’est la période des attentats anarchistes de Ravachol et Vaillant entre autres.
  • [39]
    Frimousse, « La soirée parisienne », ibidem.
  • [40]
    « Chronique du dimanche. Exploits de belle minette », La Lanterne, 13 novembre 1893.
  • [41]
    Voir Richard Balducci, Les Princesses de Paris. L’âge d’or des cocottes, Paris, Éditions Hors Collection, 1994.
  • [42]
    Selon Jean Chalon, Liane de Pougy. Courtisane, princesse et sainte, Paris, Flammarion, coll. « Grandes biographies », 1994.
  • [43]
    Voir Phillip Winn, Sexualités décadentes chez Jean Lorrain. Le héros fin de sexe, Amsterdam, Éditions Rodopi B.V., 1997, p. 22.
  • [44]
    Frimousse, « La soirée parisienne », Le Gaulois, 15 avril 1894.
  • [45]
    Georges Montorgueil, Les Parisiennes d’à présent, Paris, H. Floury, 1897, p. 6.
  • [46]
    Lionnette, « Le Carnet de Lionnette », La Lanterne, 5 décembre 1896.
  • [47]
    Voir Catherine Guignon, Les Cocottes. Reines du Paris 1900, chap. « Du côté de Lesbos », Paris, Parigramme, 2012.
  • [48]
    Jean Lorrain, « Paris vicieux. Fragment de lettre », Le Courrier français, 16 octobre 1887 ; « Paris vicieux. La marquise Hérode », Le Courrier français, 2 octobre 1887.
  • [49]
    Joséphin Péladan, La Gynandre, cité par Nicole G. Albert, Saphisme et Décadence dans Paris fin-de-siècle, Paris, Éditions de la Martinière, 2005, p. 62.
  • [50]
    La Caverne, « Théâtralités », Le Moderniste illustré, n° 8, 25 mai 1889.
  • [51]
    Tout-Paris, « Bloc-notes parisien », Le Gaulois, 7 avril 1894.
  • [52]
    Édouard Beaudu, « Parades rythmées et danses au music-hall », Académie du cirque et du music-hall, Histoire du music-hall, Paris, Éditions de Paris, 1954, p. 139.
  • [53]
    Charles Castle, La Belle Otero, la dernière grande courtisane, Paris, Belfond, 1983, p. 77. Édouard Marchand, tout d’abord engagé par le couple Allemand comme directeur artistique des Folies-Bergère, va mettre au point la formule de la revue nouvelle ; il prend seul la direction en 1894.
  • [54]
    « Notes de la semaine », Les Annales politiques et littéraires, 17 mai 1903.
  • [55]
    Francisque Sarcey, « Notes de la semaine », Les Annales politiques et littéraires, 26 mai 1895.
  • [56]
    Gal, « Dans les music-halls », L’Art lyrique et le music-hall, n° 1, 1896.
  • [57]
    Clara Ward, américaine, a épousé le prince belge de Caraman-Chimay en 1889. Après avoir rencontré le violoniste Rigo à Paris, elle devient sa maîtresse puis quitte son mari, ce qui cause un retentissant scandale. Elle épouse Rigo en secondes noces en 1897, après son divorce. Toulouse-Lautrec représente le couple sulfureux en 1897 dans Idylle princière.
  • [58]
    Santillane, « Les chahuts au théâtre », Gil Blas, n° 6360, 16 avril 1897.
  • [59]
    Georges de Montorgueil, ouvr. cité, p. 121.
  • [60]
    Valérien Tranel, « Causerie hebdomadaire », L’Art lyrique et le music-hall, n° 1-102, 1896-1897.
  • [61]
    Voir Pascal Ory (dir.), La Censure en France à l’ère démocratique, Bruxelles, Éditions Complexe, coll. « Histoire culturelle », 1999.
  • [62]
    Voir Élisabeth Pillet, « Cafés-concerts et cabarets », Romantisme, n° 75, 1992, p. 43-50.
  • [63]
    Les Baigneuses de Courbet, La Fête de la patronne de Degas, l’Olympia de Manet, La Visite médicale de Toulouse-Lautrec représentent à l’évidence des prostituées, selon les signes extérieurs bien connus des spectateurs.
  • [64]
    La Cagoule, « Visions de notre heure : choses et gens qui passent », L’Écho de Paris, 5 février 1899. Le livret a été composé par Jean Lorrain, renforçant encore le lien entre l’auteur et l’univers des Folies-Bergère.
  • [65]
    A. de Mandre, « Folies-Bergère », La Comédie, n° 21, 3 octobre 1875.
  • [66]
    Un Monsieur de l’orchestre, « La soirée théâtrale », Le Figaro, n° 258, 16 septembre 1875.
  • [67]
    Docteurs Gustave-Joseph Witkowski etLucien Nass, Le Nu au théâtre depuis l’Antiquité jusqu’à nos jours, Paris, Daragon, 1909, p. 225.
  • [68]
    « La soirée théâtrale », Le Figaro, 1er juin 1894.
  • [69]
    Hector Pessard, « Le lever d’une Parisienne », Le Gaulois, 19 juin 1894.
  • [70]
    Gaston Jollivet, « Paris en chemise », Le Gaulois, 22 septembre 1894.
  • [71]
    « Réforme théâtrale », La Caricature, 6 mai 1882.
  • [72]
    « Courrier des théâtres », Le Figaro, 26 mars 1893.
  • [73]
    « Tablettes théâtrales », Le Matin, 28 mars 1893.
  • [74]
    Ryvez, « Dans les music-halls », L’Art lyrique et le music-hall, n° 1, 1896.
  • [75]
    L’Art lyrique et le music-hall, n° 1-102, 1896-1897.
  • [76]
    Ténarg, « Folichonneries Théâtre », Folichonneries, n° 4, 28 février 1897.
  • [77]
    Le M. du B., « Concerts et spectacles. La soirée », Le Figaro, n° 129, 8 mai 1896.
  • [78]
    Des Planches, « Courrier des théâtres », La Presse, n° 1456, 23 mai 1896.
  • [79]
    Georges Montorgueil, ouvr. cité, p. 6.
  • [80]
    Henri Nicolle, « Liane de Pougy », La Revue illustrée, vol. 22, 11e année, 15 juin-15 novembre 1896.
  • [81]
    La première version, Oriane, est publiée en 1893, puis reprise en 1896 (La Revue illustrée, 1er juillet 1896) sous le titre La Légende d’Amadis et de la fée Oriane.
  • [82]
    « Tablettes théâtrales », Le Matin, 14 mai 1899.
  • [83]
    Strapontin, « Paris la nuit. Aux Folies-Bergère », Gil Blas, 15 mai 1899.
  • [84]
    Addé, « Soirée parisienne. Cythère aux Folies-Bergère », Le Gaulois, 27 avril 1900.
  • [85]
    G. de Villette, « Aux Folies-Bergère. Cythère », Gil Blas, 27 avril 1900.
  • [86]
    René Maizeroy, Le Miroir, Paris, Ollendorff, 1892, p. X. La pantomime est dédiée à Jane Demarsy, actrice aussi célèbre pour sa beauté que pour sa richesse, peinte par Manet (Printemps. Jeanne de Marsy, 1881), elle apparaîtrait reflétée dans le miroir du Bar aux Folies-Bergère (1881), derrière Méry Laurent, autre courtisane en vogue.
  • [87]
    « Tribunaux », Le Matin, 22 février 1883.
  • [88]
    « Paris et départements », Le Ménestrel, n° 27, 5-11 juin 1881.
  • [89]
    Alain Corbin, « La rencontre des corps », Histoire du corps, Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine, Georges Vigarello (dir.), t. 2 : De la Révolution à la Grande Guerre, Paris, Seuil, 2005, p. 191.
  • [90]
    Voir Annelise Maugue, L’Identité masculine en crise au tournant du siècle, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 2001.
  • [91]
    Maurice Delsol, Paris-Cythère, ouvr. cité, p. 218.
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