Begotten (E. Elias Merhige)







La naissance du monde à travers des tableaux insoutenables et surréalistes…
Begotten // Affiche
Avant de signer L’Ombre du vampire et Suspects zéro, deux titres relativement anecdotiques, Elias Merhige marqua durablement bon nombre de cinéphiles à l’affut de bizarreries et d’étrangetés en lâchant sur les festivals Begotten, un film expérimental qui continue aujourd’hui de se tenir en tête du podium des œuvres les plus folles du septième art. Choquant, provocateur, génial, scandaleux, novateur, culte, gratuit, bon nombre d’adjectifs ont été usés à son propos.
De son propre aveu, E. Elias Merhige écrit la trame de Begotten sur le modèle d’une tragédie grecque, en puisant dans les rites tribaux et les naissances des mythes religieux. Il n’a alors que vingt ans, et il passera ensuite quatre années à mettre en scène son brûlot. Filmé en 16 mm, en noir et blanc, dénué de tout dialogue et refusant à toute forme de narration classique,Elias Merhige prend soin de forger sa petite bombe sans compromis avant de la lâcher dans les salles.
Quoiqu’il soit arrivé à la Recherche et à la Découverte dans les arts d’aujourd’hui, les artistes doivent se comporter en archéologues si le cinéma visionnaire veut vraiment montrer ce qu’il a dans le ventre. Ils devront revenir aux profondeurs de l’inconscient collectif pour découvrir ce que nous sommes. De ce rêve universel pourront émerger nos voix les plus personnelles et déterminées.
(notes d’Elias Mehrige à propos du film, via ED Distribution)
Sans concession, le cinéaste adopte la forme d’un poème expérimental morbide et extrême, une vision cauchemardesque de la genèse du monde où l’on viole, on torture, on traîne dans la montagne des corps pris de spasme, on fouette… Âmes sensibles s’abstenir, la vision de certaines séquences sont tout bonnement insupportables. Imaginez Eisenstein adaptantDante, le Luis Bunuel de Un Chien Andalou portant les représentations les plus sordides de Bosch sur un écran, et vous aurez une vague idée de l’horreur qui vous attend pendant un peu plus d’une heure.
Mais bien évidemment, Begotten est plus que cet objet frondeur. Le voyage aussi douloureux que fascinant, hallucinatoire et organique, multiplie les symboles dans des visions apocalyptiques, comme pour nous préciser que c’est du chaos que naît la beauté. D’un côté, il s’agit de la beauté esthétique du film en lui-même, mais aussi de celle du cheminement des personnages. Après le suicide de Dieu, une femme donne naissance à celui qui capitalisera toutes les cruautés et sauvageries de figures mystiques aux visages masqués. Et de cet abominable chemin de croix (les figures religieuses sont légion) débutera la vie.
Begotten // Photo
Allégorie nihiliste de la naissance du monde, on suit quelque peu hagard ce trip erratique dont on peine à délier le sens profond. Mais c’est dans ce mystère que réside sa grande réussite . Polysémique, il permet toute sorte d’interprétations, ce qui fit hurler au chef d’œuvre certains quand d’autres accusèrent le cinéaste de provocation arrogante. Quoi qu’il en soit, tenter de découvrir le secret de Begotten est chose ardue, et c’est pour cela qu’il a rejoint le parangon personnel de nombreuses personnalités, tout comme il a servi de cible à d’autres.
Begotten est brillant, insupportable, inoubliable. C’est une première réalisation extraordinairement originale, un des plus importants films de l’histoire du cinéma.
Susan Sontag
Aujourd’hui encore, les débats demeurent houleux, même si le film se fait de plus en plus rare. En effet, il semblerait que le cinéaste limite l’exploitation vidéo de son œuvre au profit de séances dans le format de tournage. Le problème est qu’aujourd’hui, trouver des salles équipées en 16 mm est de plus en plus difficile. D’un côté, si cela rend plus difficile la découverte de Begotten, chaque passage au cœur de programmations forcément alternatives deviennent d’autant plus précieux.
Sylvain Perret

Commentaires

  1. he intentado ver Begotten un par de veces, pero no la he terminado.
    me localizas por @LuckAssO, por favor?

    Gracias.

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